Bâtir une équipe collaborative

Instaurer une solide collaboration au sein d’une équipe de travail semble être la recette du succès sur le plan organisationnel.

Cet article s’inscrit dans la collection « PRATIQUE EXEMPLAIRE ».
Par Emmanuelle Gril, journaliste


 

Mais mettre en œuvre une équipe collaborative est cependant loin d’être facile. Trois personnes expertes en la matière nous donnent des clés pour y parvenir et décortiquent les éléments qui peuvent nuire à son déploiement.

Échange de connaissances, partage de ressources, valorisation des compétences, encouragement de l’innovation, atteinte et dépassement des attentes, résolution des conflits… Les raisons pour favoriser la collaboration dans les équipes de travail sont légion et les moyens pour le faire sont nombreux.

Pourtant, bien des gestionnaires échouent à mettre en place les conditions gagnantes pour y parvenir. Voici ce qu’il faut garder en tête pour relever le défi.

Les atouts de l’équipe collaborative

Comme le souligne d’entrée de jeu Jean-François Bertholet, CRHA, chargé de cours au Département de gestion des ressources humaines de HEC Montréal et consultant en développement organisationnel, ce n’est pas parce que l’on fait partie d’une équipe que l’on travaille en collaboration pour autant. « Tout seul, on va plus vite ; ensemble, on va plus loin, dit un proverbe. Or, cela ne fonctionne pas toujours de cette façon, constate-t-il. Quiconque s’est déjà heurté à des difficultés pour effectuer un travail en équipe, à l’université par exemple, peut en témoigner. »

 

ANNIE BOILARD, CRHA, DISTINCTION FELLOW ET PRÉSIDENTE DU RÉSEAU ANNIE RH

« Lorsqu’un groupe réalise une tâche de façon collaborative,

toutes et tous contribuent à l’ensemble des éléments. »

 

Il existe aussi des distinctions entre le fait de coopérer et celui de collaborer, indique Annie Boilard, CRHA, Distinction Fellow et présidente du Réseau Annie RH. « Lorsqu’un groupe réalise une tâche de façon collaborative, toutes et tous contribuent à l’ensemble des éléments. C’est une structure plus dynamique et agile que celle de l’équipe traditionnelle qui, elle, fonctionne de manière coopérative, où chaque personne travaille isolément sur des éléments différents. » Pour illustrer le processus, Annie Boilard le compare à la croissance d’un arbre. « Dans une équipe qui coopère, certaines personnes vont s’activer sur les racines, d’autres sur le tronc et d’autres encore sur les feuilles. Quand une équipe adopte une structure collaborative, tous les membres tiennent compte à la fois des racines, du tronc et du feuillage. »

Composée de membres proactifs et autonomes, l’équipe collaborative génère aussi de meilleurs résultats. Elle sait apprendre de ses erreurs et, ce faisant, elle est plus à même de gérer les conflits qui pourraient surgir. «

L’équipe collaborative peut se renouveler, écouter les avis différents et les nouvelles idées, mentionne Jean-François Bertholet.

Autrement dit, elle ne se comporte pas en chambre d’écho. »

Des conditions gagnantes

Une équipe collaborative réunit des personnes aux habiletés et aux talents à la fois différents et complémentaires. On y trouve une pluralité d’expertises et de façons de penser, dans un environnement où les différences sont valorisées.

« Cela n’empêche pas l’équipe de faire preuve d’une très grande cohésion et de travailler à l’atteinte d’un but commun, signale Mario Côté, CRHA, consultant, conférencier et formateur.

Les membres de l’équipe doivent aussi détenir de solides habiletés en communication interpersonnelle, ce qui les aide également à surmonter les obstacles. En présence d’une nouvelle idée, par exemple, on ne la rejette pas d’emblée et on préfère en débattre. » Mario Côté ajoute qu’un climat de sécurité psychologique est un incontournable, afin que tout le monde se sente respecté et puisse s’exprimer en toute confiance. « La diversité des profils est un levier très puissant. En fait, plus il y a de diversité, plus l’équipe sera en mesure d’affronter les difficultés et de relever les défis. »

 

MARIO CÔTÉ, CRHA, CONSULTANT, CONFÉRENCIER ET FORMATEUR

« La diversité des profils est un levier très puissant. En fait, plus

il y a de diversité, plus l’équipe sera en mesure d’affronter les difficultés

et de relever les défis. »

 

Si la valorisation des différences et des points de vue est un atout, Jean-François Bertholet fait toutefois observer que les individus se comportant comme des électrons libres et plaçant leurs intérêts avant le bien commun ont un effet dommageable. Les personnes dont l’ego prend toute la place et qui travaillent à leur propre succès plutôt qu’aux performances de l’équipe peuvent donc grandement nuire à l’esprit de collaboration.

Susciter la collaboration

Les qualités inhérentes à une meneuse ou à un meneur d’équipe sont un autre facteur déterminant.

« Cette personne doit s’efforcer de soutenir les membres de l’équipe ; c’est un chef d’orchestre qui donne aux individus la possibilité de prendre leur place, et qui doit en outre être en mesure de saisir ce dont l’équipe a besoin pour progresser, indique Annie Boilard. Autrement dit, elle ou il se met au service du groupe et a une bonne lecture de la situation en temps réel. »

Annie Boilard prévient qu’une cheffe ou un chef d’équipe qui comprend mal la nature de son rôle peut compromettre la collaboration.

« La posture adoptée pèse lourd dans la balance, dit-elle. Vouloir tout décider et se montrer trop interventionniste peut nuire à l’équipe. » Par ailleurs, pour susciter la collaboration, mieux vaut s’efforcer de favoriser l’esprit de solidarité et éviter d’instaurer un climat de compétition.

Jean-François Bertholet insiste sur le fait qu’une cheffe ou un chef d’équipe doit aussi savoir recourir aux personnes appropriées au moment adéquat et pour accomplir les tâches qui leur conviennent. Pour y arriver, une connaissance fine des forces et des limites de chacune et de chacun est essentielle. « Il faut se méfier de la collaboration excessive, note-t-il. Ainsi, libérer un membre de l’équipe pour qu’il puisse se consacrer à une tâche dans laquelle il excelle est plus constructif que de lui demander de se joindre à une réunion où il n’apportera pas de réelle valeur ajoutée. »

La réussite passe aussi par la responsabilisation des membres de l’équipe, de même que par le courage et l’engagement, fait valoir Mario Côté. « Le leader doit se soucier d’éviter l’ambiguïté et établir des règles de fonctionnement claires qui n’entretiendront pas de confusion et aideront les gens à avoir confiance en leurs capacités », conclut-il.

 

7 compétences incontournables

Voici sept compétences à développer pour constituer un bon élément au sein d’une équipe collaborative :

_ Empathie, intelligence émotionnelle et compétences en communication interpersonnelle

_ Flexibilité, proactivité

_ Bonne connaissance de ses forces et de ses limites, lucidité, capacité d’autocritique

_ Capacité à sortir de sa zone de confort et à exprimer ses besoins

_ Aptitude à donner son point de vue avec respect et civilité

_ Capacité à fournir une rétroaction constructive

_ En cas de conflit, habileté à débattre sainement et à chercher une solution gagnant-gagnant

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