Minéraux critiques ressources stratégiques pour le Québec ?
Cet article s’inscrit dans la collection « ACCOMPLIR ».
Par Mélanie Larouche, journaliste.
Acteurs clés de la décarbonation et de la lutte contre les changements climatiques, les minéraux « critiques et stratégiques » (MCS) viennent soutenir l’innovation verte et, de ce fait, la transition énergétique du Québec.
Les MCS sont nommés ainsi pour leur rôle de premier plan dans l’atteinte des objectifs environnementaux de notre gouvernement. Notre sous-sol est riche en métaux et minéraux critiques et stratégiques, et les attentes à leur égard sont très élevées. Les MCS du Québec sont maintenant au nombre de 28, à la suite de la plus récente mise à jour de cette liste en janvier 2024 (on comptait 22 MCS auparavant). « Certes, il y en a beaucoup au Québec, et il faut savoir que chaque pays a sa propre liste, selon sa situation et ses objectifs respectifs », indique d’entrée de jeu Alexandre Nana, Ph. D., M.A.P, Adm.A., coordonnateur au Centre d’excellence sur les métaux stratégiques Éléments08. Depuis 2023, Alexandre Nana est également coordonnateur de la recherche au cégep de l’Abitibi-Témiscamingue.
« Ces métaux sont jugés critiques en raison de leur importance pour l’économie du Québec, et parce qu’ils présentent un grand risque quant à la difficulté d’approvisionnement ; et ils sont qualifiés de stratégiques parce qu’ils jouent un rôle essentiel dans la mise en œuvre des politiques du gouvernement du Québec en matière d’environnement et de développe- ment durable », explique-t-il.
Alexandre Nana précise que les MCS en lien avec la filière batterie sont parmi les plus importants. « En tout premier lieu le lithium, pour son potentiel élevé que l’on connaît bien, mais aussi le cuivre, le graphite — qui fait déjà l’objet de plusieurs projets —, le zinc, le cobalt, le nickel — pour lequel des mines produisent des sous-produits —, et le titane. Pour la toute première fois de l’histoire, les métaux précieux ont été délogés du premier rang des substances les plus recherchées au profit des métaux critiques et stratégiques. Les dépenses en exploration et mise en valeur touchant les MCS ont continué de croître au cours des dernières années. »
« Plusieurs défis se posent : il faut les séparer, extraire d’autres minéraux. Les MCS ne viennent pas forcément d’une mine ; ils peuvent aussi provenir de “mines urbaines”, c’est-à-dire du recyclage. »
Alexandre Nana, Ph. D., M.A.P., Adm.A. Coordonnateur au centre d’excellence sur les métaux stratégiques éléments08. et coordonnateur de la recherche au cégep de l’Abitibi-Témiscamingue
Répondre aux besoins de l’industrie
En recourant au Centre d’excellence sur les métaux stratégiques Éléments08, le Centre technologique des résidus industriels (CTRI) poursuit une vision de développement étroitement liée aux besoins de l’industrie minière.
« Au sein d’Éléments08, le CTRI collabore avec Corem, un centre d’expertise et d’innovation en traitement de minerais, pour répondre aux besoins actuels des entreprises », dit Alexandre Nana. Éléments08 propose des solutions aux problèmes concrets liés aux métaux critiques que rencontrent les entreprises, notamment sur les plans environnemental, social et économique. Le but poursuivi est de mettre au point des procédés toujours plus verts et durables. On veut traiter les rejets dans tout le processus d’extraction des minerais.
Les défis
Les défis techniques liés aux MCS sont majeurs. « En tout premier lieu, la mise en place de procédés durables est primordiale, note le chercheur. Pour l’or, le fer, le diamant, on sait comment faire, mais pas pour les MCS. Plusieurs défis se posent : il faut les séparer, extraire d’autres minéraux. Les MCS ne viennent pas forcément d’une mine ; ils peuvent aussi provenir de “mines urbaines”, c’est-à-dire du recyclage. Comment exploiter ces sources ? Il faut concevoir des procédés propres et durables, parce qu’on veut respecter l’environnement, réduire l’empreinte carbone. On doit aussi prévoir la valorisation des rejets, rien ne doit rester à la fin du processus. »
Alexandre Nana signale également qu’il manque de main-d’œuvre spécialisée. « On a besoin d’ingénieurs, notamment dans les domaines du génie des procédés et des génies chimique, géologique et métallurgique. La demande est très forte ; la formation dans ces secteurs est donc indispensable. »
La valeur ajoutée du Québec
Le Québec a établi ses priorités en matière de développement durable et de sa filière batterie, et les MCS ont un important rôle à jouer. « Nous ne devons pas dépendre des autres pour atteindre nos objectifs, explique Alexandre Nana. La valeur ajoutée du Québec est sa capacité à mettre en œuvre ses propres politiques de manière quasiment autonome. Le sous-sol est riche, l’expertise est là, nous sommes en mesure de décider par nous- mêmes de ce que nous voulons faire. Le Québec peut occuper une place de premier plan dans cette course mondiale. Certains vont frapper à nos portes. »
Les quatre grandes orientations du PQVMCS 2023-2025 sont les suivantes :
Orientation 1 : accroître les connaissances et l’expertise à propos des MCS
Orientation 2 : mettre en place ou optimiser des filières de façon intégrée en partenariat avec les régions productrices de MCS
Orientation 3 : contribuer à la transition vers une économie durable
Orientation 4 : sensibiliser, accompagner et promouvoir
La valorisation des minéraux critiques
Avec le Plan québécois pour la valorisation des minéraux critiques et stratégiques 2020-2025 (PQVMCS), le gouvernement s’est fixé comme objectif de faire du Québec un chef de file de la production, de la transformation et du recyclage des minéraux critiques et stratégiques en partenariat avec les milieux régionaux et autochtones.
La dernière phase du plan, publiée en janvier 2024 et intitulée Plan d’action du PQVMCS 2023-2025, actualise les actions qui serviront, d’abord et avant tout, à soutenir le développement des projets miniers de MCS et à relever les défis environnementaux qu’ils pourraient représenter.
En savoir plus :
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