Réflexions pour un développement urbain heureux
Cet article s’inscrit dans la collection « Transition écologique ».
Par Clémence Cireau
Aspirés par les banlieues, les cœurs villageois ont été vidés de leur substance marchande et intégrante par l’apparition des centres commerciaux et l’action centrifuge des axes autoroutiers attirant vers le centre-ville. Résultat : dévastation des terres agricoles, disparition d’une vie communautaire et perte inestimable d’un patrimoine architectural remplacé par des arrondissements en quadrilatères que l’on ne peut quitter qu’en voiture.
Michel Pagé, ingénieur à la retraite du domaine de la coopération internationale, maintenant essayiste, propose une solution de densification urbaine tout autre : un développement urbain fractal. « Sous le mot développement, on cache des horreurs de l’urbanisation. La démarche écologique se doit d’englober une nouvelle vision de l’aménagement de l’espace, plus proche de la nature. Sinon, les efforts pour la protection de l’environnement risquent d’être vains au sein des agglomérations. »
La démarche écologique se doit d’englober une nouvelle vision de l’aménagement de l’espace, plus proche de la nature. Sinon, les efforts pour la protection de l’environnement risquent d’être vains au sein des agglomérations.
Michel Pagé, ing.
Inspiration flocon (crystal) de neige
Observateur de la nature, Michel Pagé a eu l’idée du développement urbain fractal l’hiver dernier. « Il y a eu des flocons d’une épaisseur exceptionnelle. Je me suis alors rendu compte que l’harmonie de la nature se retrouvait souvent dans cette configuration fractale, notamment les flocons de neige, certains coquillages – comme le dollar de mer – et même le brocoli. C’est une forme très inspirante qui répond aux différents défis posés par l’étalement urbain. »
À l’image des branches d’un flocon de neige, la configuration d’un espace urbain fractal offre entre autres l’espacement nécessaire pour conserver les milieux humides et laisser une importante place de vie pour les habitats naturels. « Pour les citoyens, on peut y installer des parcs, des fontaines et des potagers. » Cette forme contre également l’apparition des ilots de chaleur, récurrents en été sur l’ile de Montréal. « Les constructions sont aérées par les vastes zones non construites entre les branches, contrairement aux quadrilatères qui enferment la chaleur au sein du bitume. »
La forme du cristal de neige a également un fort intérêt social. Le centre du flocon regroupe les commerces, les services et les propositions culturelles. Ce centre vivant pourrait être desservi par un système de transport en commun efficace, le long d’axes importants, étant donné que les habitations seraient construites le long des branches de cette structure urbaine fractale. « Dans notre étalement urbain actuel, il est très compliqué de constituer un réseau de transport simple et efficace pour tous. Cette structure le permettrait ! »
Regarder au loin
La forme fractale permet d’offrir un horizon naturel à tous, « indispensable pour l’équilibre psychologique », n’enfermant ni la nature ni les citoyens. Quant à la connexion entre ces différents « flocons immobiliers », Michel Pagé souhaite pousser sa réflexion du côté de la forme des roses, qui faciliterait le lien entre les différents faubourgs. Convaincu, l’ingénieur reste lucide. « Je n’ai pas les millions pour mettre en œuvre mes idées. Mais j’espère qu’elles susciteront l’intérêt des promoteurs et des urbanistes capables de les réaliser. Au Québec, nous sommes seulement huit millions, mais nous polluons comme si nous étions dix fois plus nombreux. Arrêtons d’utiliser du vocabulaire vert pour donner l’illusion de concevoir des projets architecturaux écologiques. Faisons-les vraiment, nommément par ce modèle fractal innovateur ! »
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